Avant que tu ne commences à parcourir ce que je nomme une « brève (?!!) de comptoir », j’aimerais t’en toucher deux mots.
Si tu es désireux de trouver toutes les réponses à tes questions, une analyse approfondie, de la rigueur, le pourquoi du comment par A+B, des données techniques, des courbes de réponses fréquentielles, et caetera. Je vais être franc avec toi, ce qui suit a bien des chances de te laisser sur ta faim ou pire, de t’ennuyer ferme. Ne te méprends pas, ta démarche est on ne peut plus légitime et je la respecte. Mais pour ma part, un retour d’expérience, alias feedback, ne saurait être assimilable à un test.
Si tu te décides malgré tout à aller plus avant, garde à l’esprit que même si cette « brève de comptoir » prendra parfois des allures de test dans sa forme et son déroulement, elle n’en est donc absolument pas un, à l’instar de toutes celles que j’ai écrites dans ce lieu et ceux qui l’ont précédés. Elle est le reflet de ce que je suis depuis un bon bout de temps et de ce que je suis attaché à demeurer : un amateur, un aficionado avec un peu, beaucoup de subjectivité, son lot de questions sans réponse, aujourd’hui empreint de ces certitudes qui ne seront peut-être plus celles de demain, mais toujours avec sa passion et sa sincérité.
Voilà, tu sais désormais ce qui t’attend, si j’ose dire. Le cas échéant, il ne me reste plus qu’à te souhaiter une bonne lecture. Dans le cas contraire, je te souhaite de trouver prochainement ton bonheur dans cette quête du Casque idéal.
Isalula
… On pourrait naturellement en déduire qu’entre octobre 2007, l’AKG K701 et septembre 2008 il ne s’était rien passé. Et bien pas du tout, car si aucun nouveau Casque n’avait assouvi ma curiosité, j’avais pourtant franchi un cap décisif quelques mois auparavant.
Hé oui, il était inutile de se voiler la face, si je voulais savourer le meilleur de ce que l’AKG K340 avait à offrir, il me fallait en passer par le pays de l’Oncle Sam et plus particulièrement Head-Fi afin d’acquérir ne serait-ce qu’un seul de ces K340 ayant bénéficié de tout le savoir-faire de certains de leurs détenteurs et maîtres du fer à souder. Le contexte étant propice, ce ne seront au final pas moins de trois exemplaires qui viendront s’ajouter à ma harde et ce pour ma plus grande satisfaction.
Parallèlement j’avais aussi évolué significativement afin de sustenter cet exemple d’exigence qu’était l’AKG K340 puisque un RudiStor RP-33, de surcroit solidement upgradé d’où son appellation de Special Edition, trônait désormais en bonne place dans mon Headphone Café.
Avec le recul, je sais combien Dame Chance m’avait grandement favorisée. En effet, le couple qu’il formerait avec la Thule CD150B, laquelle avait avantageusement remplacée dans mon bar la MSB, durerait plusieurs années, et ce pour le meilleur.
Mais c’est du nouveau venu, à savoir le Beyerdynamic DT 880 Edition 2005, dont il va être question dans cette « brève de comptoir ».
Je ne le savais pas encore, mais à nouveau le hasard avait décidé de me mettre face à celui qui deviendra mon nouveau Casque de référence. Toutefois, à la différence du K340 dont la découverte avait eu toutes les allures d’un coup de foudre, rien de semblable ne se produisit durant les premiers temps passés avec le DT 880. J’imagine qu’accoutumé comme je l’étais à la signature typée de l’AKG, je cherchais inconsciemment un trait à même de définir le DT 880. Je n’étais d’ailleurs pas loin de conclure que la musicalité telle que Beyerdynamic la définissait m’était décidément étrangère. Et pourtant il y en avait bel et bien un, mais je ne l’avais pas encore perçu, pas encore ressenti, pas encore appréhendé. A l’instar des gens que la vie nous amène à rencontrer, certains Casques se révèlent d’emblée, d’autres se livrent peu à peu. Ne jouissant pas du charme spontané d’un K340, le DT 880 pour sa part imposait à l’auditeur que j’étais de laisser du temps au temps. Ce que j’ai été heureusement en mesure de faire, ne s’agissant pas d’un prêt mais fait rarissime d’une acquisition.
Mais d’ailleurs, pourquoi diable avoir jeté mon dévolu sur cette petite annonce, à fortiori avec le satisfecit de fraîche date qui m’habitait ? Ma foi, je suppose que c’est la perspective de ne voir aucune nouvelle rencontre se profiler à l’horizon qui en fut la cause. La première leçon à tirer de cette histoire est celle-ci : Les essais, ça peut s’avérer dangereux !
En effet, le Beyerdynamic DT 880 n’était pas censé être autre chose que satisfaire à une saine curiosité, c’est bel et bien ce que je croyais en toute sincérité. Ca ne vous rappelle rien ? Moi si en écrivant ces mots, un certain AKG K340 environ deux ans plus tôt…
Mais faisons sans plus attendre les présentations. Le DT 880 se situe dans la catégorie Casque poids moyen (290 grammes) Le design est sobre mais n'a pas oublié d'être élégant, le port est stable. Tout comme le premier Beyerdynamic que j’avais rencontré la construction est sans reproches, exceptions faites de son câble droit asymétrique de 3 mètres, malheureusement inamovible et aussi d’un bandeau d’arceau qui a tendance à coller un peu. Si je devais le résumer en deux mots à ce stade je dirais de lui qu’il est primo, solide et secundo, confortable.
Le boîtier en carton qui l’abrite recèle une sacoche en cuir noir plutôt élégante à l’intérieur de laquelle le DT 880 est logé dans un écrin de mousse. Pas de miracle, un adaptateur Jack 3,5/6,35 millimètres doré à vis fait office d’unique accessoire. Circulez, y a plus rien à voir !
D’un rendement et d’une impédance que je situe dans la moyenne (96 dB & 250 Ω) il n’est certes pas aussi exigeant que certains, suivez mon regard, pour pouvoir en tirer le meilleur. Un ampli « chaud » ajoutant une touche de rondeur dans le haut du spectre pourrait s’avérer opportun. Ceci dit, c’est à chacun d’en juger. Personnellement, le Beyerdynamic fonctionnera suffisamment bien avec mon RudiStor pour que l’AKG K340 perde la suprématie qui était la sienne depuis deux ans, en l’espace de quelques semaines !
Pas de doute à nourrir là-dessus, le DT 880 restera le synonyme d’une étape marquante, la seconde en fait, après celle qui fut incarnée par l’AKG K340.
Nul besoin de disposer à nouveau d’un DT 770 pro 80 Ω pour appréhender de suite les divergences de signature à l’écoute du DT 880, et tout d’abord avec un registre grave bien moins démonstratif en termes de quantité, axé ici essentiellement sur la texture et l’extension. Mais le meilleur à mon goût se situe bel et bien dans un médium plus musical, richement timbré et subtilement mis en exergue. C’est d’ailleurs grâce à lui que je commencerai à prendre la mesure du potentiel que recèle le DT 880. Et enfin l’aigu, qui s’avère d’une plus grande finesse tout en faisant preuve de clarté. Quant aux différences d’architecture, celles-ci auraient plutôt tendance à favoriser davantage le DT 880, d’architecture semi-ouverte. Toutefois, n’oublions pas que les deux Casques ne sont pas destinés au même usage.
Edition 2003, Edition 2005, le changement dans la continuité pour le DT 880 ? Certains l’affirment en arguant qu’il s’agit des mêmes drivers, d’autres ne jurent que par l’Edition 2003 qu’il juge meilleure que la nouvelle mouture et ainsi de suite... Quant à moi, faute d’une version 2003, celle-ci étant mine de rien assez rarissime en seconde main, il me sera impossible de me forger une opinion avérée. Toutefois, une théorie retiendra toute mon attention. Son auteur y partait du principe que si les drivers étaient effectivement en tous points identiques, la différence de signature était quant à elle bien réelle et imputable à la nouvelle architecture dont avaient bénéficié les chambres de l’Edition 2005.
Positionné entre le DT 770 et le DT 990, le DT 880 fut le Casque le plus homogène que j’ai possédé jusqu’à cette époque. Il était plus transparent qu’un K340 dans sa version Bass-Light. Sa signature me faisait penser, pour je ne sais quelle raison et dans une certaine mesure, aux Stax. Dans une certaine mesure, car ceux que j’avais pu entendre étaient de facto plus aboutis en termes de transparence, de spatialisation, de timbres... Là où un K340 flattait divinement une partie du médium, le DT 880 jouait plutôt pour sa part la carte de la sobriété.
Quand le message se complexifie, il assure. C’est lisible et aéré. Là encore, je sais que certains Stax font mieux, mais on n’est plus dans la même catégorie de prix et de technologie. Qu’en était-il face à un AKG K340 expertement modifié comme ceux que je détenais depuis quelques mois ? Et bien, la présentation du DT 880 est plus frontale, l’image est moins spacieuse. La signature est plus vivace et aussi plus droite sans être insipide, les attaques possèdent un mordant accru. La ligne de basse est restituée sans excès, avec des graves fins et secs, sans rapport avec l’opulence et la rondeur de ceux d’un Sennheiser HD 650, par exemple.
A bien y réfléchir, je pense que si j’avais décidé d’upgrader vis-à-vis d'un DT 880 à la recherche de davantage d'équilibre et de transparence, je serais devenu Staxien, à moins que l’AKG K1000 ?...
Le rendu de certains instruments avec ce Casque, le piano et surtout la guitare sèche sont un pur bonheur. La restitution des voix n’est pas en reste, à la véracité accrue et où la moindre inflexion se perçoit sans effort. C’est superbe, mais gare à ces sources à l’équilibre montant ou à la compression excessive, le DT 880 ne tempère rien, tout comme les Stax.
J’adorais ce grain si particulier qu’il savait insuffler aux voix… Tina DICO, Jesse SYKES, Chris REA, Julia MIGENES et bien d’autres… Même le très réputé K1000, arrivé quelques mois plus tard dans mon bar, n’est jamais parvenu à prendre réellement l’ascendant sur cet aspect précis.
A ceux qui seraient réticents face à un HD 650 ressenti comme plus sombre et plus enrobé tout comme vis-à-vis d’un K701 plus éthéré et plus épuré, il me semble que le DT 880 soit à même d’être l’un de ces Casques se situant, si je puis dire, à la croisée des chemins.
Quant à moi, j’avais les yeux rivés avec une insistance croissante vers l’Allemagne, de plus en plus désireux de découvrir ce que le DT 880 pourrait bien être susceptible d’avoir encore à m’offrir.
Headphone Road
Septembre 2008